Un récent décret (Décret n°2017-1008 du 10 Mai 2017) précise les modalités de contestation d’un avis d’aptitude du médecin du travail.
Pour rappel, jusqu’au 31 Décembre 2016, pour contester les décisions du médecin du travail, les salariés et employeurs devaient faire appel à l’Inspection du Travail. L’Inspecteur du travail en référait alors au MIRTMO (Médecin Inspecteur Régional du Travail et de Main d’Oeuvre) dont l’avis s’imposait alors à toutes les parties.
La procédure était simple, gratuite, plutôt rapide et surtout terriblement efficiente.
Pour une raison encore assez obscure, l’ancien gouvernement, à travers la loi El Khomri et sous prétexte de simplification du code du travail, a décidé de modifier cette procédure.
Depuis le 1er Janvier 2017, lorsqu’un salarié ou un employeur n’est pas d’accord avec l’avis d’un médecin du travail, il doit désormais contester l’avis devant le tribunal des prud’hommes dans les 15j. La procédure peut être faite en urgence (en « référé »), mais la notion d’urgence est toute relative lorsqu’on parle de justice et de tribunaux engorgés.
Une fois que le tribunal est saisi, s’il s’estime compétent, il demande une expertise médicale dont les frais sont (consignés) assumés par le demandeur.
Si le médecin expert n’est pas d’accord avec le médecin du travail, le président du tribunal peut demander avis auprès du MIRTMO.
Au final, ce qu’il faut retenir de cette réforme :
- les délais de contestation vont dramatiquement augmenter laissant les salariés et les employeurs dans des situations très complexes à gérer.
- la procédure devient payante et complexe avec pour conséquence évidente d’éloigner de l’accès au droit les salariés les plus précaires financièrement
Premières jurisprudences
Les premières jurisprudences arrivent déjà et dénote de la complexité de cette nouvelle procédure. En effet, la première question est déjà de savoir ce qui est contestable dans l’avis d’aptitude d’un médecin du travail. La loi prévoyant que seuls les éléments de nature médicale peuvent être contestés. Ainsi le 20 Avril 2017, le tribunal de Metz à débouté de sa demande un employeur sur ce motif. A la lecture de l’ordonnance de référé (disponible ci dessous) on peut légitimement s’interroger sur la définition même de la « nature médicale ». Comment contester des éléments dont les parties n’ont que partiellement connaissance, puisque protégé par le sceau du secret médical ? La santé au travail par nature est intriqué entre le médical et le juridique et souvent il est bien difficile de les séparer.
Il faudra de nombreux jugements remontant jusqu’à la cour d’appel puis à la chambre sociale de la cour de cassation, donc de nombreuses années, afin d’y voir clair dans cette nouvelle procédure.
Pendant ce temps, les salariés dont la santé dégradée atteint leur aptitude à leur poste prendront leur mal en patience… comme toujours…
Les textes :